mercredi, novembre 21, 2007

Histoire "pas" vraie

Elle attend, depuis longtemps ou probablement pas assez longtemps. Depuis une heure ou deux, depuis une heure qu’elle ne connaît pas de peur de s’impatienter, de se donner une raison de partir. Des fois elle fait exprès d’oublier de porter une montre, s’interdit de demander l’heure dans la rue, ou dans les salles d’attente.

Elle s’amuse à deviner l’heure. L’heure approximative, l’heure où elle arrêtera de tapoter sur la table, de faire claquer le talon de sa chaussure sur le parquet, sur le dallage, sur le grès…
elle regarde sa montre, une montre qu’elle n’a pas. Un poignet nu qui la rassure.

Tant qu’il n’y a pas d’heure, c’est que sûrement il est encore temps. Il ne faut pas que cela soit trop tard pour rester, ou trop tôt pour partir. Juste le temps qu’il faut pour l’attendre.

Des fois il venait, d’autres il se faisait attendre. Il se fait attendre comme la fois où sous la pluie cinglante d’un certain 11 décembre, il avait promis d’être là et qu’elle est restée une heure en train d’espérer qu’il appelle, qu’il réponde au téléphone, qu’il donne de ses nouvelles. Sans nouvelles. Elle est restée là en train de regarder passer les gens et les voitures qui éclaboussaient les trottoirs lavés.

Elle regardait mourir les gouttes de pluie à la surface de l’eau du lac gris, elle regardait s’écraser ces gouttes sur le pare-brise de sa voiture. Elle a attendu en ramenant le téléphone à son oreille pour espérer entendre sa voix après la sonnerie. Mais la sonnerie n’aboutissait jamais. Elle a ouvert la portière et a franchi cette cloison transparente qui fait que l’habitacle ne vous protège plus. Elle est face à ce vent glacial, seule les pieds dans l’eau, en train de faire une prière.

Drôle d’idée que celle qui fait que nous aurons probablement raison d’une minute à l’autre, d’avoir attendu si longtemps. Alors que tout présageait que nous aurions dû partir depuis longtemps. Depuis que le téléphone a cessé de vous préserver la dignité.

Elle se souvient des jours où il ne jurait que par son amour pour elle, elle se souvient du jour où il lui disait que quoi qu’il arriverait, il serait toujours là à l’heure. Qu’il suffisait qu’elle l’aime, qu’il suffisait qu’elle dise oui…et son cœur s’est serré, elle s’est sentie étouffée, en face de ce lac qui n’en finissait pas, ces palmiers qui cédaient sous le vent... elle a failli céder sous le poids du malheur et cette envie d’y croire encore…elle en a tremblé jusqu’à avoir fait tombé la clé de la voiture. Il faisait nuit, elle s’est penchée, elle a balayé l’asphalte de la main, a tâtonné ici et là la chaussée froide et mouillée par la pluie. Sous ses pieds elle a ramassé sa clé, essuyé d’un geste nerveux sa main à son manteau, sa clé contre son cœur, elle a essuyé ses yeux embrouillés. Elle s’essuie de tout ce que ce sentiment noble qu’elle porte, l’a souillée. Elle a regagné son siège, a fait tourner le moteur.

« Il ne viendra pas ». cette pensée l’a traversée, d’un coup. Cela faisait des heures et des heures, des jours et des semaines qu’elle voyait venir cette absence. Cela faisait des milliers de minutes qu’elle essayait d’éviter qu’il ne parte. Il n’est même pas parti. Il n’est, tout simplement, jamais venu.

Elle prend son courage, le courage qu’il lui reste, le brillant de ses yeux qui lui reste, la foi qui lui reste. Que des restes. Et elle décide de se rendre là où les filles avaient rendez-vous... (à suivre)

3 commentaires:

chevi a dit…

joli récit.. tu arrives à nous immerger ds cette ambiance noire, la suite stp...

Anonyme a dit…

tres emouvant

coco_baboucha a dit…

je reste sans voix! mais merde c'est toujours le meme scénario qui se répète, souffrance quand tu nous tient aaaaarrrghhh
la suite la suite la suite la suite la suite la suite... !!!!!!!